Quid de Seria Ludis

Auteur, Game designer, consultant formation , j'ai réalisé plusieurs projets ludopédagogiques, participé à des concours de créateur, édité un jeu, "Termik" et j'édite un projet chez Funforge". Dans Seria Ludis, je vous propose de découvrir mes avis, mes projets et ma contribution au monde du jeu et de la formation.

mercredi 24 avril 2019

Journal d'un meeple, jour 6 Savone promenade dans l'Italie d'entre deux guerres.

Poulpy ! voilà ce qui arrive quand on est pas sage : enchaîné !

Si vous voulez découvrir mon voyage et ma découvert de Savone sautez cet avant propos très décalé.


Avant propos : Mort au vieux cons !

Les vieux, c'est comme les cons, faudrait les tuer à la naissance.
Oui je sais c'est radical.
Mais laissez moi vous expliquer. 
Mes matins ont toujours été difficiles. Partagé entre la douceur de la couette et la rigueur du réveil, je préfère la couette.
Sitôt levé, je râle, je traîne, je procrastine avant même d'avoir quoi que ce soit à faire.
Le matin c'est pas bien. Jusqu'au café. Ahhh, l'amertume salvatrice, c'est le jus du monde qui te coule dans la bouche. Oui, oui, le jus du monde, amer, acide, trouble comme une eau sale, le café c'est un concentré de tout ce qu'une bonne journée te réserve. Et donc je suis comme un zombie jusqu'au café.
Ce jour aurait pu commencer comme tous les autres. Réveil difficile, douleurs d'une quarantaine affirmée, déplacement laborieux jusqu'à la source de vie, amertume du café et relativisme. Mais ce matin... Ce matin là ! 
Nous descendons au Fiorentino, les tables sont bondées, un serveur, par borborygme, m'interroge sur ma nationalité. Je me retiens de faire de même. Il nous installe entre un couple de vieillards, une mégère permanenté (comment les mégères font elles pour avoir des permanentes parfaites au réveil ? Elles s'enlève la tête pour dormir ? Pourquoi la remettent elles ? ) un deuxième couple de vieillard quelconques dans leur banalité moyenne. Je prends sur moi, je dis bonjour, j'essaie un sourire, c'est dur mais j'y arrive. "Ahhh ! des français." : C'est le cri d'extase des vieillards. "Ahhh, des français, ça fait du bien parce qu'avec tous ces étrangers..."
-Surtout ne réagit pas, me dit la petit voix dans ma tête.
"Les italiens ça sait pas se tenir, ils parlent tout le temps, et bla bla bla, les espagnols c'est pire ! et blablabla, Vous êtes monté à Marseille ? Et blablabla, et les serveurs, pas un seul qui parle français correctement."
Je n'aime pas les matins.
Mais je déteste encore plus, les vieux racistes et cons. Pire encore les vieux racistes et cons, aigris. La mégère permanentée n'a plus assez de longueurs de bras pour porter ses breloques. On dirait une devanture de bijouterie fantaisie, le charme en moins. Elle les agite de façon ostentatoire. Comme elle est seule, je suis rassuré, son mari ne lui a pas survécu. Le pauvre homme une vie entière à coté d'un truc pareil, je l'envie presque d'être parti avant la fin. Mais moi c'est la fin du petit déjeuner que j'espère, que j'appelle de mes vœux, cette fin, ou la leur.
A gauche, c'est dire s'ils sont mal placés, l'autre couple renchérit. "Ah mais c'est toujours pareil, la dernière croisière que j'ai fait et blablabla, étrangers, pas normaux, blablabla, pas français, rien contre les gens de couleur, blablabla" La dernière croisière ? Tu veux dire que ces masochistes ils y reviennent ? Ils râlent, ils se plaignent et ils y reviennent ? C'est quoi leur problème ? Une vie terne et trop de temps pour dépenser leurs économies ?
Mais y a des solutions. EU-THA-NA-SIE ! Ça se pratique en suisse, une petite piqûre et hop plus rien.
Le couple face à eux "Nous on était au massage hier, c'était bien, elle savent y faire les petites bridées, c'est quoi d'ailleurs ? Des chinoises?" J'ai un subit renvoi que je retiens à grand peine, ça se fait pas de vomir dans son assiette. J'imagine les mains des masseuses sur ces masses fripées, adipeuses, je les plains. La torture s'achève mon repas est fini, de toute façon j'ai plus faim. Je veux pas devenir vieux, con c'est trop tard, mais vieux, pitié, pas comme ça en tout cas.
De toute façon, les cons, c'est comme les vieux, faudrait les tuer à la naissance.
Mais les vieux cons faudrait les laisser vivre et leur souhaiter une longue et lente agonie.

Savone, à droite les boutiques à gauche l'inconnu

Certaines villes te donnent une étrange impression. Celle de n'être pas vécue. Une ville qui n'est pas vécue, c'est comme un décor en carton pâte, avec des figurants qui bougent et s'animent, qui vivent leur vie comme on déchiffre une nouvelle partition. Les habitants de Savone sont ce qu'on attend d'eux, sourires, éclats de voix "à l'italienne", grands gestes, ils jouent leur rôle de résidents d'une ville touristique de la côte méditerranéenne avec une franche et belle efficacité.  Savone a été bombardée pendant la seconde guerre mondiale. Son centre ville a été reconstruit comme on rebâtit la version fantasmée d'une ville. Larges artères, bâtiments droits et réguliers, pas un immeuble plus haut que l'autre, une architecture variée qui rassemble classicisme, colombages à l'autrichienne, colonnades, moulures en plâtre, l'ensemble est surchargé, surprenant, mais sans profondeur, sans vie. Dans les années 70 Savone était une destination de vacance appréciée.

Les chemins de traverse



Vous l'aurez compris nous aimons visiter les villes par leurs petits cotés. Avec Savone notre petite équipe prends les chemins de traverse. Nous montons ici, nous passons par là, nous découvrons l'envers du décor. De ce point de vue la ville est plaisante. Un chemin s'ouvre sous nos pieds. Nous croisons des meeples en pleine meeple map. Ils se croisent, se saluent, s'interrogent, se séparent, se recroisent ... Mais voient - ils la ville autour d'eux ?
Ces drôles d'arcades qui sont des balcons partagés?  Ce pégase qui orne le mur de la poste? Il s'agit d'une commande de Mussolini à son sculpteur préféré. Sous le vernis, sous le décor, pointe l'histoire. Des thèmes se détachent, prenons les chevaux.
Ici c'est un pégase à la gloire de l'Italie fasciste. Plus loin c'est Garibaldi faisant face à la mer qui monte un fier destrier.
Là encore, dans cette rue commerçante un pégase stylisé apparaît sur un mur.
D'autres histoires se profilent.
 

Savone ésothérique, Savone magique les symboles cachés 

Avez vous déjà remarqué qu'un œil averti reconnaîtra toujours les composantes de sa culture.
En quelques photos je vous propose un voyage vers le mystère. Je ne commenterais pas ma visite, je vous propose juste de légender les images.
au façades du théâtre le temps c'est arrêté,
les poètes du passé sont ici rassemblés,  Metastasio 

Goldoni,
Alfieri


Rossini

Le sage, le militaire, la mère et la veuve encadrent le couple qui porte la cloche de la mémoire

Le merveilleux commence où Alice rencontre le Lapin
Quelques étranges notes d'une antique musique s'accrochent à la devanture d'une boutique


Continue le chemin jusqu'à l'Alpha...

... tu trouveras le symbole des anciens Sabbats 

au bastion où te portent tes pas, sur le gazon il est couché


si sur ta dextre tu avances, c'est en enfer que tu iras.
Car ce parc abandonné est à la gloire du premier des poètes italiens : Dante Alighieri


le soleil sur le mur trace le temps de ses rayons
Ici c'est l'heure et là la date
 Achevons là notre visite de Savone, il y aurait encore beaucoup à dire des rues trop droites, des parcs abandonnés, de la ville et de sa vie.
Mais je me suis bien trop étalé.
Prochain épisode : la dernière nuit des passagers

lundi 15 avril 2019

Journale d'un meeple, jour 5 l'escale qui n'existait pas

Promenade sur le littoral

Avant propos : tous les chemins ne mènent pas à Rome !

Aujourd'hui, c'est l'escale romaine, merveilles et antiquités, ruine et prestige. Rome ville capitale. Rome cœur fatigué d'un empire déchu. Rome chant vibrant aux accents chargés de vie, chargés d'histoire. Rome, brune flamboyante au regard amusé, aux formes pleines, dont les hanches souples dansent aux rythme de ses pas qui s'éloignent. Rome, où je n'irais pas. 3 heures de transport aller-retour pour ne percevoir qu'un soupir de la cité aux 7 collines. 5 petites heures pour gâcher le plaisir d'une première rencontre avec l'histoire, avec le mythe, tel qu'il me fit vibrer dans mes jeunes années. Non, je ne peux m'y résoudre. Aujourd'hui l'escale ne sera pas romaine. Je m'y refuse. Mes pas ne me mèneront pas à Rome. Je flânerais sur le littoral, à l'image des généraux d'antan, je regarderais la mer et j'attendrais.

Civitavecchia, l'escale qui n'existait pas

Est ce que c'est le type de vue qu'on avait d'une trirème ?
Quelle étrange contraste entre Palerme et Civitavecchia. C'est vraiment notre première impression. Xavier et Catherine nous accompagnent pour visiter la ville. Nos premiers pas nous mènent dans une rue calme et propre aux trottoirs larges et dégagés. Nous arrivons vite au quartier historique. Vieilles fortifications, petites églises charmantes, beaux bâtiments, ici un conservatoire de musique en l'honneur d'Ennio Morricone situé dans une vieille bâtisse, là un passage qui s'enfonce un pied d'une vieille tour. Et partout une sensation de calme, de tranquillité. Sommes nous encore en Italie ?


L'histoire à grands pas

Ici Garibaldi en 1848 débarquera avec 7000 hommes et boutera les français hors de la future Italie.
Mais il n'est pas le seul personnage à avoir arpenté les rues de la cité portuaire. Les nobles et généraux romains de l'antiquité bâtissaient leurs villégiatures sur les collines de la ville, face à la mer. Il reste encore un théâtre romain et divers bâtiments. Au détour d'un chemin nous tombons sur la maquette taille réelle d'une trirème. Plus précisément un quart de trirème. 
Plus loin c'est une étrange rencontre que nous faisons.  Un samouraï a séjourné à Civitavecchia. Hasekura Tsunenaga, ambassadeur du japon, converti au catholicisme a traversé mers et océans au 16ème siècle. Il a visité les Amériques, la vieille Europe, est passé à Civitavecchia.  On peut trouver une statue de taille humaine à son effigie ainsi qu'une carte rappelant son périple.

D'étranges églises

Une blanche "cathédrale" occupe la place centrale de la ville. Elle semble n'avoir rien de vraiment exceptionnel. Nous nous approchons et marquons un temps d'arrêt.
La porte monumentale est composée d'un triptyque de statues.
Un christ et une vierge forment les battants de la porte.


Ils sont surmontés d'une sculpture monumentale représentant Dieu. L'évocation
est surprenante. Elle me fait penser au Dies Irae, la colère divine de la bible. Ça donne pas vraiment envie de continuer son chemin.

Autre fait étrange, dans toutes les église de civitavecchia où nous sommes entrés nous avons vu un étrange symbole que je ne connaissais pas. Malgré toutes mes recherches je n'ai pas trouvé de références à ce symbole.







Quelques traces de culture Mudéjar

 Après ces visites nous sommes allés consommer une excellente glace dans un petit parc devant l’hôtel de ville. L'entrée du bâtiment est gardée par deux lions qui nous rappellent les sculptures du palais des rois de Palma, dans le pur style mudéjar.
Dans ce parc nous voyons une insolite petite tour d'une cinquantaine de centimètre.

 Nous n'avions pas de Meeple map pour cette escale, mais je pense qu'il y aurait matière à en créer une.
Cette ville nous aura laissé une excellente impression : des sites chargés d'histoire, une déambulation agréable, que nous finissons en faisant le tour d'un puissant bastion gardant l'entrée du port.

Nous rentrons au bateau vers 14h00 grignotons un morceau sur le pouce et partons jouer.

lundi 8 avril 2019

Journal d'un meeple jour 4 Palerme


Palerme, coté face

 Avant propos

Les mystérieuses histoires de tonton Gigi

 - Aujourd'hui les enfants, je vais vous raconter l'histoire des momies de la crypte des capucins de Palerme.
-Et oui !
- Tout à commencé au 17ème siècle. Les moines du prieuré capucin de Palerme avaient un tout petit cimetière avec plein de morts. Quelqu'un sait ce qu'est un capucin ?
Oui Xavier ?
En effet, c'est un singe avec le cul rose et une coupe de cheveu ridicule, mais aujourd'hui nous nous intéressons à un autre capucin.
Personne ?
Bien, un capucin, c'est une espèce de singe avec une coupe de cheveux ridicule et le cul rose, mais qui croit en Dieu, ce qui le rend absolument supérieur à n'importe quel autre singe.
- Revenons à nos agneaux (c'est comme des moutons mais en plus jeune et plus sacrifiable)
Comme les gens continuaient à mourir et que les anciens morts ne voulaient pas laisser la place aux nouveaux, ils songèrent à entasser les morts dans un nouveau coin. Sous le prieuré, il y avait de vieilles galeries qui avaient une fâcheuse tendance à dessécher la viande qu'on y entreposait. Comme le besoin de place se faisait pressant, les moines se dirent qu'une fois vidés des morceaux inutiles on pourrait y mettre à sécher les vieux moines usés. Ni une ni deux c'est ce qu'ils firent. Et là miracle, une fois trempés dans le formol et desséchés par l'atmosphère de la crypte, les corps se préservèrent. Et on put apprécier longtemps le beau sourire de frère Sylvestro. Si longtemps d'ailleurs que ce nouveau procédé d'inhumation fit fureur à Palerme. Et bien vite, les pauvres gens qui avaient trop de sous demandèrent à se faire vider les entrailles et dessécher pour que leur famille aimante puisse aussi profiter longtemps de leur beau sourire.
Non Juliette, les moines ne sont pas vénaux. Ils essaient de survivre dans un milieu complexe. S'ils étaient vraiment vénaux, ils feraient visiter leur crypte à des milliers de touristes, ils vendraient des photos et ils mettraient en scène les corps des enfants de tous ces pauvres riches qui se sont fait embaumer dans leur plus beaux habits.
D'ailleurs, à ce sujet, les enfants, il est temps d'y aller !
Non Olivier, nous n'allons pas éclater du zombie dans un vieux cimetière maudit. Mais ce sont des momies, pas des zombies que nous allons voir. Comment ça Conan il en a rien à faire, Zombie ou momie il leur pète la tête. Oui c'est vrai, mais c'est Conan...
Maxence, arrête de trainer la patte et relate nous donc la suite de ton journal !

Palerme aux deux visage

Palerme est une ville étrange. Vous l'aurez peut être compris notre petit groupe a décidé de se rendre au sud de la ville pour aller visiter cette étonnante crypte. Et pour s'y rendre nous avons choisi de nous y rendre à pied. Ce sera pour nous l'occasion de découvrir l'autre face de cette cité. Lors de notre périple, nous traversons d'étranges parcs où poussent d'énormes Ficus magnolias aux racines aériennes. Plus loin un buisson d'ortie crève le pavage du trottoir. Ici, entre le béton éclaté des trottoirs trop étroits poussent toute une litanie de mauvaises herbes. La nature reprend ses droits. Bien vite nous proposons une hypothèse. Les quartiers sud de Palerme abritaient surement une ancienne université de magie druidique. Suite à une incompréhensible erreur d'invocation, un sort majeur de végétalisation a échappé à tout contrôle. Ses effets se sont répercutés jusqu'aux abords du palais royal. Les quartiers sud sont peu à peu envahi par une végétation sauvage qui prend la place du béton. D'étranges petites chapelles abondent à chaque coin de rue surement pour contrer l'invasion végétale. Après une bonne heure dans des rues cocasses nous arrivons à la crypte des capucins. Le spectacle est saisissant. Après une volée de marche, nous entrons dans une crypte aux murs blanchis. Les corps, par centaines sont exposés dans des alcôves, pendus au mur, scénarisés. J'ai le souvenir d'une chapelle composée essentiellement de corps d'enfants et de nourrissons dont les positions singeaient des posture du vivant. Si le mausolée accueille près de 8000 corps, 3000 d'entre eux sont momifiés par calcification. Les premières momies datent du 17 ème siècle les dernières du début du 20 ème siècle. Pendant les années de guerre la crypte est fermée pour être rouverte dans les années 80. Depuis le passage des milliers de touriste, le gaz carbonique qu'ils dégagent, les ouvertures pratiquées pour faire rentrer la lumière ont transformé l'atmosphère et dégradés les momies.
Cette visite s'inscrit totalement dans notre concept de tourisme geek.
Nous continuons notre visite du vieux Palerme en nous arrêtant dans un café pâtisserie. Notre petit groupe d'une dizaine de personne investit la terrasse et perturbe les habitudes des anciens qui s'interrogent sur la présence de cette bande de touriste bruyants dans leur coin de tranquillité.

La face claire

Après les rues pittoresques du sud de Palerme, nous arrivons au abords du palais royal. Larges trottoirs entretenus, beaux bâtiments,  parcs et végétaux organisés forment un contraste saisissant avec les rues que nous venons de quitter. La cathédrale, majestueuse, n'est pas aussi surchargée que la plupart des bâtiments religieux du pourtour méditerranéen. Une claire lumière tombe sur de blanches colonnes. Sur le marbre, au sol, prés de l'autel est dessiné un horoscope, il s'agit d' une horloge astronomique. Là, ma balance siège auprès du bélier de Sabrina, si ça c'est pas un signe.
Il y aurait encore beaucoup à montrer de Palerme, les étranges statues qui encadrent un palais de justice, souvenir de la gloire fasciste.












Le Teatro Massimo Vittorio Emanuele , le plus grand théâtre d’Italie et le troisième plus grand d'Europe. Le mieux consiste encore à vous rendre sur place et à penser à faire un détour par ces quartiers moins connus du sud de la ville.